Les entreprises ont été nombreuses à improviser le télétravail avec le premier confinement. Les difficultés inhérentes à ce mode de travail se sont ressenties tant sur le moral des salariés que sur la productivité de chacun. Matériel inadapté, mauvaises habitudes, absences de réflexe… Autant d’éléments à prendre en compte pour que la situation puisse être bien vécue, ne pas sombrer dans l’inertie ou encore être ralenti.
Alors, quelles sont les conditions de réussite du télétravail ?
Nous verrons que les facteurs clés de succès reposent sur l’adaptation des pratiques managériales et la prise en compte de l’hybridation de l’organisation du travail (mix télétravail et présentiel). Au coeur de ce dispositif pour réussir la mise en place du télétravail en entreprise : la formation des managers et des collaborateurs.
L’adaptation des pratiques managériales
Si les télétravailleurs se révèlent majoritairement satisfaits et si de nombreux bénéfices sont perçus tant par les salariés que par les dirigeants, pour 56 % d’entre eux, l’inconvénient principal du télétravail concerne les difficultés à manager des collaborateurs à distance. (Enquête Malakoff-Médéric « Télétravail : regards croisés salariés et dirigeants »).
Il est en effet largement admis que la pratique du télétravail exige de mettre en place de nouvelles méthodes de management et de nouvelles procédures.
De surcroît, la réussite du télétravail en entreprise repose sur un postulat fondamental : la relation de confiance entre un responsable et chaque salarié en télétravail. Deux aptitudes complémentaires sont indispensables pour réussir : l’autonomie et la responsabilité nécessaires au télétravail.
Un management basé sur la confiance
Avec le travail à distance, fini l’évaluation basée sur le présentéisme !
Le manager doit apprendre à lâcher prise sur le quotidien, à ne pas tout contrôler et à faire confiance. Cependant, il doit être clair sur le cadre, les objectifs et les critères d’évaluation et fixer des objectifs SMART.
Pour faciliter l’organisation de ses collaborateurs, il peut proposer de découper les livrables ou fractionner les objectifs sur des périodes plus courtes.
Par ailleurs, il est préférable de privilégier les missions nécessitant réflexion ou rédaction pour les journées télétravaillées, et de réserver les missions ou projets transversaux pour les jours passés au bureau.
Pas de contrôle abusif
La question du contrôle reste sans doute la plus discutée dans le cas du télétravail et c’est celle qui pose naturellement le plus de problèmes aux managers. Une tentation consiste à vouloir contrôler davantage le salarié en télétravail. Or, il n’y a pas de raison ! On demande rarement à un salarié présent dans l’entreprise de faire un rapport quotidien de ses activités.
Par conséquent, la supervision et le contrôle excessifs sont à proscrire dans la gestion quotidienne des télétravailleurs. Multiplier les appels intempestifs et les reportings à remplir est inutile, voire contreproductif. Une surveillance trop pesante pourrait entraîner du stress et une sensation de perte d’autonomie et de responsabilité chez le collaborateur.
Pour le manager, il s’agit cependant aujourd’hui de gérer à la fois les salariés qui sont en télétravail mais aussi les collègues non-télétravailleurs afin d’organiser et d’intégrer le télétravail dans le fonctionnement global de son service.
Donner un cadre
Le management d’équipe, c’est avant tout l’établissement de règles claires et communes qui fixent les limites, marge de manœuvre et responsabilité de chacun au sein de l’équipe ». Dans le cas du télétravail, au-delà du respect des règles contenues dans l’accord télétravail de l’entreprise lorsqu’il en existe un, la première tâche du manager consiste ainsi à instaurer un cadre clair, connu par l’ensemble de l’équipe en amont. Quelques exemples :
- Définir des règles de répartition des jours de télétravail dans le service,
- Fixer des plages de disponibilité du télétravailleur,
- Envisager un temps de travail présentiel minimum dans les locaux de l’entreprise, afin notamment de planifier des temps collectifs.
Adapter la communication et avoir les bons outils
Parmi les défis à surmonter pour bien gérer le télétravail, le manager doit réussir à pallier au manque de contacts. Il s’agit de créer de nouvelles formes de relations favorisant les échanges entre collaborateurs. En effet, même – et peut-être surtout – en télétravail, le salarié doit rester en contact avec son manager et avec le reste de son équipe. Mettre en place les outils de communication adéquats est un prérequis à la réussite du télétravail.
Afin de pouvoir échanger à tout moment avec ses collègues, son manager ou encore ses clients, les bons outils comprennent au minimum un ordinateur avec les logiciels adéquats ainsi qu’un accès aux documents et données de l’entreprise, un smartphone ou un téléphone fixe sur le lieu du télétravail, une messagerie interne éventuellement instantanée, des outils de visio ou de web conférence. L’accès à des fonctionnalités de partage des agendas constitue également une réelle plus-value afin de connaître la disponibilité des collègues.
Maintenir une cohésion d’équipe
Pour un manager, il est important de maintenir la cohésion de son équipe malgré l’absence physique de certains collaborateurs. En effet, l’expérience a démontré que les équipes dispersées peuvent notamment souffrir de problèmes de coordination, de crises de confiance et/ou d’une dynamique de groupe négative.
Le partage d’un planning collectif visible par tous constitue un premier outil simple à déployer. Pas nécessairement informatisé, mais au contraire affiché dans le service, il permet de visualiser les jours de présence physique et les jours en télétravail de chaque collaborateur mais aussi les absences de chacun (temps partiel, formations, congés, etc.). Il est également important de ne pas oublier les télétravailleurs dans les e-mails ou les convocations aux réunions et de maintenir des liens au sein de l’équipe en organisant des rencontres régulières entre tous les membres du service.
Le cas des collègues non-télétravailleurs
Le télétravail n’est cependant pas l’affaire des seuls télétravailleurs : il concerne l’ensemble des salariés de l’entreprise qui doivent travailler collectivement. Ainsi, une autre difficulté managériale est aussi de gérer les salariés qui ne sont pas en télétravail et ont parfois une mauvaise image des télétravailleurs. Nombre de télétravailleurs se retrouvent “en dehors du coup” car ils étaient en télétravail pendant quelques jours. Une discussion informelle ou le fait de ne pas forcément planifier de réunion pour discuter avec un collaborateur au bureau, et c’est un membre de l’équipe qui se retrouve sur la touche !
Par conséquent, l’effort doit aussi venir des collègues qui travaillent au bureau pour intégrer comme il se doit les autres membres de l’équipe qui télétravaillent aux discussions, réflexions, et décisions en cours.
L’Observatoire de la parentalité en Entreprise donne des conseils au « télémanager » vis-à-vis des collègues non-télétravailleurs.
Il est notamment important de communiquer avec eux sur le principe du télétravail, de les former aussi aux outils collaboratifs et de les sensibiliser sur le fait que les télétravailleurs sont bien présents au travail, même si à distance. Afin de ne pas se créer de surcharge de travail, les collègues doivent les solliciter normalement et ne pas répondre à leur place mais leur rediriger les demandes qui les concernent.
Avec près d’un tiers des salariés régulièrement ou occasionnellement en télétravail, c’est désormais toute l’organisation qui est impactée. Les pratiques préconisées pour répondre à la problématique du management du télétravail peuvent ainsi permettre au manager de diriger de manière plus efficace l’ensemble de son équipe et chacun de ses membres.
La Formation des managers et des collaborateurs
La formation professionnelle est particulièrement mise en avant comme levier de réussite dans le nouvel accord national interprofessionnel de novembre 2020 et ouvert à signature jusqu’au 23 décembre. Cet accord vise « une mise en œuvre réussie du télétravail ».
On ne saurait être plus clair. Le télétravail a engendré des changements d’organisation et de nécessaires adaptations managériales. Une montée en compétences des managers et des salariés, par le biais de la formation, est un moyen d’en assurer une mise en place réussie. »
Il est recommandé que les managers soient, dès leur prise de poste, formés aux modalités du management à distance et à la prise en compte des particularités de l’hybridation de l’organisation du travail : articulation et concomitance entre télétravail et travail sur site.”
Cet enjeu est pointé avec une telle netteté dans ce nouvel accord qu’il va jusqu’à lister les thématiques de formations pouvant être proposées. De quoi donner des axes de formations à privilégier pour toutes les entreprises :
- L’adaptation des modalités de réalisation de l’activité (management, vente à distance, etc…)
- L’autonomie du salarié en télétravail,
- Le séquençage de la journée de télétravail,
- Le respect du cadre légal relatif à la durée du travail et à la déconnexion,
- L’utilisation régulée des outils numériques et collaboratifs, etc…
Le texte imagine également « des guides pratiques » pouvant être mis à disposition pour accompagner les managers et salariés dans la mise en place du télétravail.
Ce volet formation comprend également l’acquisition de compétences numériques (utilisation des nouveaux outils de travail à distance) mais également à la sécurisation des données de l’entreprise (formation en cybersécurité).